La situation sanitaire des femmes enceintes et des nouveaux nés reste et demeure une préoccupation majeure en Guinée. Selon l’étude démographique sanitaire de 2018 EDS, le taux de mortalité maternelle se situait à 576 décès sur 100 000 naissances. Une évaluation de la qualité des services de santé maternelle et néonatale réalisée en 2018 en Guinée et au Togo a révélé que la qualité globale des soins offerts par les prestataires de la Guinée est très faible. La même étude a montré que les formations sanitaires du pays sont situées dans un rayon de 1 à 954 km d’un hôpital régional, ce qui réduirait l’accessibilité des soins obstétricaux et néonatals. Et concernant l’environnement de travail, en Guinée comme au Togo, les formations sanitaires ne répondent pas aux normes établies par le ministère de la santé en termes de nombres de jeux complets d’accouchement et de lits ; 50 % des formations sanitaires ne disposent que d’une seule table d’accouchement.
La pauvreté, l’absence d’assistance médicale à l’accouchement et la non-utilisation des services de soin prénatal font partie des causes du taux élevé de mortalité maternelle.
La césarienne qui a été déclarée gratuite par l’ancien président guinéen en 2013 pour sauver des femmes en cas de complication à l’accouchement n’a été qu’une promesse de campagne. Cette décision n’a pas été respecté dans la plupart des centres de santé et hôpitaux du pays. La césarienne a longtemps été la vache laitière des médecins dans le pays, le prix de l’opération varie de 2 millions à 5 millions de franc guinéen. Une situation qui a causé des décès de plusieurs mamans à Conakry comme à l’intérieur du pays.
Malgré des campagnes de sensibilisations menées par des ONG pour des consultations prénatales, plusieurs femmes choisissent encore l’accouchement à domicile surtout dans les zones rurales.
Celles qui acceptent de se rendre dans les hôpitaux sont parfois maltraitées ou refoulées par les sages-femmes et médecins. C’est le cas de la femme enceinte décédée en mai 2021 à l’Hôpital de Kankan pour n’avoir pas versé une somme de 700 00fg à la sage-femme comme frais de prise en charge. Une autre femme chassée par des médecins à l’hôpital préfectoral de Mamou a accouché en septembre dernier au bord de la route par manque de moyen financier. La même année une sage-femme accusée d’avoir frappé une femme dans la salle d’accouchement a été battu par le fiancé de cette dernière à l’Hôpital de Fria.
L’étude menée par l’OMS (Organisation Mondiale de la Santé) dans quatre pays dont la Guinée en 2019 a également révélé que plus d’une femme sur trois a été maltraitée pendant son accouchement. Ces résultats n’ont fait que confirmer des faits devenus ordinaires dans certains établissements sanitaires. Dans ce pays où le mariage précoce est très répandu, ce sont souvent des adolescentes de moins de 18 ans et qui n’ont pas eu accès à l’éducation qui se retrouvent confrontées à ce genre de pratique dans les structures sanitaires selon l’OMS. Cette étude publiée dans la revue scientifique britannique The Lancet fin 2019 a mis en évidence la pratique de mauvais traitements des femmes enceintes dans les structures sanitaires. Cela a poussé les quatre pays concernés à savoir la Guinée, la Birmanie, le Ghana et le Nigeria a annoncer et adopter un plan d’action pour améliorer la prise en charge des femmes enceintes.
Par ailleurs, si la recommandation de l’OMS pour les femmes enceintes est passée de 4 à 8 consultations prénatales, le pourcentage des femmes ayant passé 4 consultations prénatales a baissé. Elle est passée de 57% en 2012 à 35% en 2018, ce taux varie de 38% en milieu urbain à 24% en milieu rural selon EDS Guinée 2018.
Certaines femmes se plaignent du manque de médecins qualifiés dans les villages ou districts, c’est le cas de Doko à Siguirin ou Morodou à Mandiana où des femmes parcourent de longues distances pour se rendre à l’Hôpital préfectoral pour des soins.
La plupart des décès maternels peuvent être évités si nos sages-femmes sont bien formées dans l’assistance des femmes enceintes et si nos services de santé sont équipés pour une intervention rapide et efficace en cas de complication à l’accouchement. En attendant, des femmes meurent chaque jour en donnant la vie en Guinée.